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Histoire de Derval, selon Ogée Istor Derval, hervez Ogée

 

 

Derval; gros bourg, sur une hauteur et sur la route de Nantes à Rennes; à 11 lieues 1/4 N. de Nantes, son évêché, et à 10 lieues 3/4 de Rennes. Il y a une subdélégation; une haute et moyenne justice qui ressortit au présidial de Nantes; deux postes, l'une aux lettres et l'autre aux chevaux. La seigneurie a titre de baronnie, et appartient à M. le prince de Condé. On y compte 2000 communiants, y compris ceux de Lusanger, sa trève. ve. La cure est à l'Ordinaire, ainsi que le légat de l'abbesse. Ce territoire renferme plusieurs bois taillis, qui sont : les Nombrais, Lurion , l'Indre, la Haie-au-Sanglier, la Brosse-Guerin, la Brosse-Aubert, Condé-Chesné, le bois de la Justice, la Haie-Chambily, le Rombray, le Codigueux, le Pas-Guillaume, le Grand-Fougerai, le Grand-Lugas, le Petit-Lugas, la Brosse-du-Mortier-Clément , le bois d'Anguerdelle , la grande Brosse-Ronde, la petite Brosse-Ronde et le Parpier-Coueraud. Outre ces taillis, on y voit un grand étang, nommé le Pas-Guillaume, situé auprès du bois du même nom, et partie de la forêt de Domenèche. On trouve dans cette forêt des vestiges d'un chemin romain; mais on ne peut découvrir sa direction. Celles des terres de Derval qui sont bien cultivées sont assez fertiles en grains. On y fait du cidre. Il y avait autrefois, auprès de ce bourg, de riches carrières d'ardoises qui sont depuis long-temps abandonnées.

Dans l'acte de la consécration de l'église de Saint-Nicolas-d'Angers, faite au commencement de l'année 1096, par le pape Urbain II, en présence de Benoît, évoque de Nantes, on voit que l'église de Derval est mise au rang des biens de cette abbaye. Elle devint ensuite dépendante du monastère de Saint-Pierre de Bourgerelle-en-Yallée, ordre de saint Benoît, au diocèse d'Angers, et les religieux de ce couvent y faisaient encore, en 1620, les fonctions de curés et de recteurs. L'an 1240, Guillaume, seigneur de Derval, donna à l'abbaye de Meilleraye, ordre de Cîteaux, vingt livres de revenu, à prendre sur les tailles de Derval, laquelle somme devait leur être payée par son receveur. Cette donation fut ratifiée et approuvée, au mois de mai 1275 , par Bonabes de Derval, son fils, qui mourut le 4 août 1325, et fut inhumé dans la chapelle du château, dédiée à saint Denis, sépulture ordinaire des seigneurs de cette maison. En 1246, Méen, seigneur de Derval, et l'abbé de Pornic, se disputaient les marais nommés de Ritors. Comme ils ne voulaient ni l'un ni l'autre se relâcher de leurs prétentions, ils convinrent de soumettre leurs droits à l'arbitrage d'un juge impartial. Aubin, doyen de Retz, fut celui qu'on choisit pour terminer cette affaire. Après avoir examiné les pièces qu'on lui avait fournies, il décida, en présence de l'abbé de Blanche-Couronne, que les biens en litige appartenaient au monastère de Pornic.

On trouve dans le premier volume des Preuves de l'histoire de Bretagne, par dom Morice, que le duc Artur, dans son Parlement tenu à Nantes, l'an 1302, permit à Bonabes de Derval et à ses successeurs de porter dans leurs écussons deux quartiers d'hermines, écartelées avec leurs autres armoiries, comme il leur plairait. Cet article, ajoute l'auteur, fut enregistré à ce Parlement. Cette pièce est fausse, quoiqu'elle se trouve au château de Nantes : Artur II ne put tenir cette assemblée l'an l302, puisqu'il ne fut duc de Bretagne qu'en 1306. Du Paz dit que les seigneurs de Derval sont issus, en ligne directe et masculine, des anciens rois et ducs de Bretagne (1). Cette opinion n'est pas sans fondement. Après la mort de Bonabes, la seigneurie de Derval passa à la maison de Rouge de Châteaugiron, et de celle-ci dans celles de Malestroit, d'Acigné, de Brissac et de Condé, où elle est maintenant. L'histoire fait assez souvent mention de Derval, surtout de son château, qui fut une des plus fortes places de Bretagne : il était situé à une demi-lieue au nord du bourg, flanqué de neuf tours, tant grosses que petites, et entouré de fossés et d'un étang rempli d'une eau courante, qu'on retenait ou qu'on laissait couler par de petites écluses. Il avait en outre deux murs qui le cachaient : le premier était peu de chose ; mais le second était formé par des bâtiments qu'il fallait traverser pour arriver au troisième pont, où se trouvait la principale entrée. Il appartenait, en 1373, à Robert Knolle, qui y fut assiégé par le connétable Bertrand Duguesclin , à la tête de quatre cents gentilshommes bretons. Les assiégés se défendirent fortement pendant quelque temps; mais enfin ils capitulèrent, obtinrent un délai, et donnèrent des otages pour gages de leur parole. Le terme expiré, le duc d'Anjou se rendit lui-même devant le château, et envoya un héraut pour sommer la garnison de se rendre. Knolle. qui avait eu le temps de réparer ses fortifications et de se mettre en défense, répondit qu'il n'avait consenti que malgré lui au traité, et qu'il ne rendrait sa place que par la force des armes. Le duc, informé de la réponse des assiégés, leur fit dire que, si le château ne lui était rendu à l'instant, il allait faire couper la tête aux otages qu'on lui avait donnés. Knolle, transporté de colère, répliqua que ces menaces ne pouvaient l'intimider; mais que, si on les exécutait, il userait de représailles. Ou ignorait les moyens de vengeance qu'il pouvait avoir, et les otages furent amenés à la vue du château, où on leur trancha la tête. C'étaient deux chevaliers et un écuyer. Knolle aperçut cette exécution, et se vengea comme il l'avait dit. Il fit placer une espèce d'échafaud sur la fenêtre la plus élevée du château, et y fit à son tour décoller trois chevaliers et un écuyer qu'il tenait prisonniers; leurs têtes tombèrent dans les fossés. A ce sanglant spectacle, le duc et le connétable levèrent le siège.

Le 19 mai 1451, Pierre II, duc de Bretagne, étant à Vannes, érigea la seigneurie de Derval, qui était une ancienne bannière, en baronnie, en faveur de Jean, sire de Derval et de Châteaugiron, grand chambellan de Bretagne, fils du seigneur de Combourg, époux d'Hélène de Laval, fille du comte de Laval et de Montfort et de la princesse Isabeau, fille aînée du duc Jean V, et sœur du duc Pierre II. Geoffroi, seigneur de Combourg, mourut le 15 novembre 1463; son corps fut inhumé dans le chanceau de l'église paroissiale de Derval, où l'on voit son tombeau avec cette inscription :

Ci-gît haut et puissant M. Geoffroy de Combourg, de Châteaugiron et d'Amanlis, qui décéda le quinzième jour de novembre 1463. Priez Dieu pour lui.

Jean de Laval, chevalier des ordres du roi, lieutenant-général de ses armées, gouverneur de Bretagne, et seigneur de Chateaubriand, donna, par acte passé à Paris le 15 janvier 1539, la baronnie de Derval, de laquelle dépendaient alors Beauregard et la Ville-au-Chef, situés dans la paroisse de Nozay, à Anne de Montmorenci, premier baron, grand-maître et connétable de France. L'an 1590, les troupes du duc de Mercœur assiégèrent et prirent le château de Derval; et, en 1593, il fut assiégé et pris, pour la dernière fois, par les troupes du roi Henri IV, qui en fit démolir toutes les fortifications , dont on ne voit plus aujourd'hui que les ruines. Il appartient actuellement à M. de la Massue, qui possède aussi la terre de la Haye, avec basse et moyenne justices. En 1611,1e duc de Montmorenci obtint du roi Louis XIII des lettres qui portaient que la terre et seigneurie d'Anguignac relèveraient à l'avenir de la baronnie de Derval. On connaît encore à Derval la maison noble de la Garelaye (1) , auprès de laquelle , dans un champ nommé la Rouxière, se trouvent des cailloux de différentes couleurs, qui se polissent aisément. Les uns ressemblent à ceux d'Egypte, et les autres imitent le porphyre, le marbre, le jaspe et l'agate orientale. Ce territoire fournit encore un grand nombre de carrières d'ardoises, dont la plupart , d'une profondeur étonnante, sont abandonnées depuis quelques années, quoiqu'elles ne soient pas épuisées. En 1774 , Mme de la Garclaye établit à Derval les filles du Saint-Esprit , au nombre de trois, qui enseignent les enfants et traitent les malades de la paroisse.
]•:. D. v.

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Des seigneurs de Derval.

(1) Le P. Du Paz ne dit point, comme le rapporte Ogée, que les seigneurs de Derval sont issus des anciens rois et ducs de Bretagne. Il prouve même le contraire en discutant, avec beaucoup de sagesse et de critique, une charte par laquelle Bonabes de Derval était autorisé à écarteler d'hermines, et dans laquelle il était reconnu comme descendant d'un Salomon, comte de Nantes, qui n'a jamais existé. Cette charte a été recueillie par dom Morice, Preuves, t. I, p. 1677, mais avec une note attestant sa fausseté, que le P. Du Paz a été le premier à démontrer.

Si les seigneurs de Derval ne descendaient pas des princes de Bretagne, leur origine ne s'en perd pas moins dans le XIIè siècle; et en 1202, Guillaume, premier du nom, que Du Paz croit être fils d'un premier Bonabes de Derval, figurait au nombre des grands seigneurs bretons rassemblés à Vannes pour aviser aux moyens de venger la mort de leur jeune duc Arthur, assassiné par son oncle Jean-sans -Terre. Il existe un peu de confusion dans la descendance de ce Guillaume, rapportée par le même auteur; mais ce qui n'est pas douteux, c'est que la seigneurie de Derval passa dans la maison de Rouge, par une fille que Du Paz nomme Agnès, mariée à Olivier de Rougé, vers 1260. (Voy. Rougé.)

Dom Morice a recueilli un sceau de Bonabes de Derval, eu 1276, portant : de gueules à deux fasces d'argent, et en légende : S. Bonabii de Derval militis : puis un autre de la même année, de Guillaume de Derval, dans lequel on trouve les mêmes armoiries, avec une bande d'argent brochant sur le tout. Le P. Du Paz a trouvé ce dernier écusson gravé sur le tombeau du dernier Bonabes de Derval, mort en 1325. Ce tombeau était placé dans la chapelle de Saint-Denis, près du château de Derval, avec cette inscription : Cy gist Bonabes de Derval fils de Monssour Bonabes, jadis seigneur de Derval, qui trespassa le quart jour d'aoust, l'an de grâce, M CCG XXV. Priez pour l'âme de li, que Dieu bonne mercy li face.

La translation de la seigneurie de Derval dans une autre maison n'amena pas l'extinction du nom. On trouve dans dom Morice, Preuves, t.1, p. 1359, un Jehan, sire de Derval, chevalier, auquel Jean III, duc de Bretagne, donne en 1332, la terre de Pont-Callec. Ou le retrouve, en 1341, présidant à l'inventaire des monnaies trouvées au trésor de l'église de Nantes, après la mort du duc Jean III. Il paraît qu'à l'exemple de presque tous les grands seigneurs bretons, il avait embrassé le parti de Charles de Blois. Aussi Jean de Mont fort, en 1345, lui retira-t-il la seigneurie de Pont-Callec pour la donner à Jeanne de Belleville, dame de Cliczon, qui fut confirmée en cette possession, en 1354, par Thomas de Hollande, gardien de Bretaigne pour le roi d'Angleterre.

Le duc Jean III, dans l'acte de donation de la terre de Pont-Callec, rappelle qu'il avait chargié ledit Jehan de Derval de porter les armes de Bretagne escartelées o les anciennes armes de Derval. Et, en effet, le sceau d'une procuration donnée par Jehan, sire de Derval, à Philippe Oannel, chapelain du duc , en 1344, porte écartclê aupre-mier, et quatre d'argent à cinq hermines posées en sautoir, doue et trois, chargé de deux fasces. Les supports sont déni dragons et le cimier un lion. Ces armes prouvent que Jehan de Uerval était de la même famille que Bouabes et Guillaume mentionnés ci-dessus. — Jehan eut plusieurs enfants de Jeanne de Léon. L'acte de 1354 nomme son fils Jehan , qui probablement défendait, comme son père , la cause de Charles de Bloii, et dont les biens maternels, situes vers Hennebont, furent confisqués et donnés à la dame de Cliczon, avec la terre de Pont-Callec.
11 y a lieu de croire que le père avait été tué devant la Roche-Derrien, en 1347.
I.à moururent en la bataille Chevaliers................
Te iiommeray les principaulx
Premier le sire de Laval, Ruban, Montfort, Rouge, Déniai, Le sire de Chasteaubrient, Moururent là en un moment. G"" de S. André.
Ce doit être son fils qui est inscrit comme banneret dans la montre d'Olivier de Clisson , en 1379, et duquel on trouve la monstre particulière dans les Preuves de dom Morice, t. II, p. 430, reçue à Therouennc, en 1383. Les noms des 31 écuyers qui paraissent dans cette monstre, ?ont pour la plupart de la Bretagne bretonuante, ou de .«es confins, et prouvent que leur banneret Jehan de Der-val n'avait plus rien de commun avec la seigneurie dont il continuait à porter le nom. Il demeurait ou au moins possédait des terres sous la vicomte de Rohan , a laquelle il rend hommage à Pontivy, en 1398, sous le nom de sire deDerval. Il est nommé, en 1387 , comme allié du connétable <le Clisson contre Jean de Montfort, dans le traité de paix passé entre ces derniers. Voilà tout ce que j'ai pu trouver concernant celte branche cadette de la maison de Berval. — l'ne famille du morne nom est portée dans la réformation de la noblesse de Bretagne, comme ayant été déclarée noble d'extraction par arrêt du 7 mars 1609. Le premier nommé de cette famille est Georges de Derval, sieur de la Lanceulle, en la paroisse de Janzé , qui vivait en 1476. et était capitaine des châteaux de Fougerayet de Derval. On trouve, au nombre des alliances de ses descendants, !<•!= Karmené, d'où leur vint la seigneurie de Bron-dineuf, 1rs Saint-Pern , les Ferrou-du-Chesne, les Saint-Gilles-Peri-cnay, etc. Jean de Derval, sieur de Brondi-neuf, et deux frères, Pierre de Derval, sieur de Bcloûan, et un cousin, conseiller au Parlement de Bretagne, produisirent à la réformation et obtinrent l'arrêt cité plus haut. Je ne trouve rien qui les rattache aux anciens sei-gucurs de Derval. Ils portaient : d'azur à la croix d'argent frettée de gueules, Biz.

 

 


(1) La Garelaye est une terre noble appartenant, des le XIIIe siècle, à.la famille Lemaistre. Artur Lemaistre, seigneur du Bois-Verd et delà Garelaye, était chambellan de Jeanll, en 1289, et Alain Lemaistre, chevalier et seigneur des mêmes terres, fut nommé capitaine du château de Jugon , en 1304, par Jean de Montfort, pour l'avoir loyalement servi, notamment au champ d'Auray. Cette famille , dont l'origine se perd dans le XIII* siècle, a été déclarée de simple extraction dans la réformation de 1668. st une des innombrables erreurs ou injustices de ce travail procédurier du Parlement de Bretagne. Biz.